1772-1795
Le prétexte était qu’il fallait rétablir l’ordre dans le Commonwealth polono-lituanien anarchique. La véritable raison était l’avarice de trois États impérialistes et absolus dont les systèmes politiques étaient en totale contradiction avec les traditions polonaises de démocratie, de liberté civile et d’autonomie.
Les racines de l’effondrement du Commonwealth polono-lituanien remontent à l’ère Wasa au XVIIe siècle, lorsque la Pologne a été envahie pendant le Déluge suédois (1655-1660). Les Polonais ont mis du temps à se remettre de la destruction de milliers d’églises, d’écoles et de bâtiments civiques. Le « liberum veto », utilisé pour la première fois en 1669, est devenu un moyen de contrecarrer toute législation adoptée par le Sejm pour réformer ou modifier le Commonwealth. En 1730, les empires de Prusse, de Russie et d’Autriche ont signé un ptotocole secret, connu sous le nom de traité de Lowenwolde, qui visait à maintenir le statu quo en garantissant que les lois du Commonwealth ne changeraient pas. Et quelques pots-de-vin stratégiquement placés ont paralysé les efforts de réforme ou de changement du Commonwealth.
Le Commonwealth polono-lituanien était clairement sur la voie de devenir un simple état vassal de la Russie tsariste. Le roi Stanislaw Poniatowski était un amoureux de la tsarine Catherine la Grande et l’ambassadeur russe, Nicholas Repnin, dicta les termes d’une nouvelle constitution au Sejm en 1767. De nombreux détracteurs ou objecteurs à cette nouvelle constitution sont exilés à Kaluga en Russie sur ordre de Nicholas Repnin.
La Confédération patriotique de Bar est formée pour expulser les influences et les forces russes du royaume. Mais la guerre civile de 1768-1772 qui a résulté des efforts de la Confédération des Bar pour maintenir l’intégrité et l’indépendance du Commonwealth a plutôt fourni aux trois puissances impérialistes une excuse pour s’emparer de territoires du Commonwealth – rétablissant l’ordre dans un pays où régnait l’anarchie. Et les Polonais allaient bientôt devenir une nation sans pays.
L’empereur Frédéric le Grand de Prusse avait depuis longtemps des ambitions sur les terres polonaises le long de la côte baltique et la liaison par voie terrestre de la Purussie orientale et du margraviat de Brandebourg. Après que les armées de Catherine la Grande aient remporté une série de succès contre les Turcs ottomans le long du Danube, l’impératrice d’Autriche Marie-Thérèse s’inquiète et envisage une action militaire. Frédéric imagine un plan qui lui permettrait de satisfaire ses ambitions territoriales, de réorienter les objectifs territoriaux de Catherine et de désamorcer l’inquiétude de Marie-Thérèse. Ce projet est réalisé entièrement aux dépens du Commonwealth polono-lituanien épuisé. Le traité de partage fut ratifié par les trois signataires en septembre 1772 et la première partition de la Pologne devint une réalité.
La plupart des Polonais sentaient que leur destin était entre les mains de leurs trois voisins impérialistes à moins que des mesures ne soient prises immédiatement pour réformer leur gouvernement. Mais, hélas, les conditions en Pologne ont continué à se détériorer. Finalement, dans un moment de bravoure et d’éclat, le Sejm polonais a adopté la Constitution du 3 mai 1791. Cette constitution, la première du genre en Europe, émancipe l’homme du commun, établit la séparation des pouvoirs entre les trois branches du gouvernement et élimine les abus du « Repnin Sejm ». Lorsque cette régénération civique est ressentie par leurs voisins, une armée russe envahit la Pologne en 1792, suivie à son tour par les armées prussiennes. En 1793, on arrive à une deuxième Parition de la Pologne, cette fois sans la participation de l’impératrice Marie-Thérèse.
Bien qu’en 1794, Thadeusz Kosciuszko se distingue en résistant à la deuxième Partition de la Pologne et à la révocation forcée de la Constitution du 3 mai, lui et ses hommes ne résisteront pas longtemps aux assauts des armées tsaristes. La Russie, la Prusse et l’Autriche estiment que la solution ultime de leur « problème polonais » consiste à effacer purement et simplement le Commonwealth polono-lituanien des cartes d’Europe. Leurs représentants signent le 24 octobre 1795 le traité qui répartit entre eux les territoires du Commonwealth. La troisième partition de la Pologne était achevée.
La Pologne devint une nation sans pays.